Re: BRF .. Incorporer ou pas ??
Publié : lun. 14 sept. 2009 11:41
Je voudrais reprendre le sujet du point de vue technique ou on l'avait laissé.
Aygues avait donc déniché le résumé d'un article canadien sur la dégradation de la cellulose et de la lignine ou
étaient rapporté des expérience de fertilisations azotés accompagnées de mesure de l'activité bactérienne et fongique.
De ce résumé, il fait plusieurs déductions.
je voudrais commenter ces 3 là :
1. "Les bactéries et les champignons n'ont pas été perturbés par un rajout de BRF ou d'engrais azoté. "
2. "la biomasse fongique augmente avec la concentration du sol en azote."
3. "quand on lit ces résultats, on ne peut plus me dire d'arrêter de mettre de l'azote dans mon compost ou dans mon "BRF" (avant de le griffer) afin d'alimenter les bactéries qui en ont besoin pour dégrader la matière organique"
A l'appui de ses affirmations, Aygues met en avant les deux fertilisations d'azote de 0, 250 et 500 kg d'ammonitrate faites par les chercheurs.
Le problème, c'est qu'il passe complètement sous silence les deux amendements de carbone, de proportions identiques, (400 ou 800 kg C) qu'on fait aussi les chercheurs... Or, à la lecture du résumé, surtout dans sa version anglaise originale, il ressort que les deux apports sont faits de façon conjointe.
1. Il parait donc bien difficile d'affirmer que "la biomasse fongique augmente avec la concentration du sol en azote" puisqu'ils n'ont pas procédé à une concentration d'azote, les deux apports d'azote ayant été compensés par des apports de carbone proportionnels. Et même si on doute que les apports aient été à toujours conjoints, les deux chercheurs précisent que c'est quand l'augmentation des deux taux est conjointe que l'on a une augmentation de la masse fongique ("As C and N concentrations increased [...]concentration of C and N (together) in the soil correlated with both cellulose and lignin degradation "
2 . Dire que "les bactéries et les champignons n'ont pas été perturbés par l'ajout de BRF ou d'engrais azoté" est tout aussi hasardeux.
Les deux chercheurs disent seulement que la population bactérienne, et elle seule, "n'a pas été affectée".
3. Quant à l'idée que les bactéries "ont besoin" de nitrate d'ammonium "pour dégrader la matière organique", elle est justement réfutée par les deux chercheurs eux-même:
"La biomasse bactérienne active n'a pas été affectée par les additions de N ou C. " !!
Et c'est logique: les bactéries ne risquent pas de se nourrir de nitrates puisqu'elles les fabriquent, ces nitrates, à partir de l'azote organique! (il existe bien des bactéries qui réduisent les nitrates, mais elles ne se situent pas dans la chaine de décomposition de la matière organique puisqu'elles en font de l'azote gazeux)]
Les nitrates ça ne sert qu'à nourrir des plantes ou des champignons.
Et c'est d'ailleurs là que réside en fait l'objectif des deux chercheurs : montrer que la dégradation de la cellulose et de la lignine est une le fait de la biomasse fongique et non bactérienne.
C'est aussi ce que rapporte l'auteur de cet autre commentaire de l'article que je traduis ainsi:
Si on veut savoir ce qu'il se passe quand on touche vraiment à la concentration de l'azote, il faut donc se tourner vers un autre article.
J'ai fini par trouver le texte complet de l'article je parlais il y a peu et qui relatait des expérience en ce sens:
Influence of nitrogen on cellulose and lignin mineralization in blackwater and redwater forested wetland soils
Ici, l'auteur, qui n'est autre que l'un des auteurs de l'article précédent, n'a procédé qu'à des apports d'ammonitrate ( 200 et 400 kg), sur deux sols différents. Puis il a mesuré leur impacts dans le temps sur les population bactérienne et fongique, ainsi que les taux de dégradation de la lignine et de la cellulose.
Il conclu (traduction personnelle) :
Morceaux choisis:
si les champignons profitent de l'amonium pour se développer, ils ne se mettent à dépolymériser la lignine que lorsque l'azote commence à se raréfier et que le C/N est autour de 100/170. (alors que dans un composteur, on est idéalement autour de 30)
Bref, fertiliser le BRF, pourquoi pas, mais attention aux doses car ici, le mieux est vite l'ennemi du bien.
La meilleure façon d'apporter de l'azote sans risquer la surdose, c'est peut-être d'utiliser des cultures de légumineuses puisque l'activité des bactéries fixatrices d'azote qu'elles renferment est elle même régulée par la concentration d'azote du sol et qu'à partir d'une certaine concentration, elles ne travaillent pas.
Aygues avait donc déniché le résumé d'un article canadien sur la dégradation de la cellulose et de la lignine ou
étaient rapporté des expérience de fertilisations azotés accompagnées de mesure de l'activité bactérienne et fongique.
De ce résumé, il fait plusieurs déductions.
je voudrais commenter ces 3 là :
1. "Les bactéries et les champignons n'ont pas été perturbés par un rajout de BRF ou d'engrais azoté. "
2. "la biomasse fongique augmente avec la concentration du sol en azote."
3. "quand on lit ces résultats, on ne peut plus me dire d'arrêter de mettre de l'azote dans mon compost ou dans mon "BRF" (avant de le griffer) afin d'alimenter les bactéries qui en ont besoin pour dégrader la matière organique"
A l'appui de ses affirmations, Aygues met en avant les deux fertilisations d'azote de 0, 250 et 500 kg d'ammonitrate faites par les chercheurs.
Le problème, c'est qu'il passe complètement sous silence les deux amendements de carbone, de proportions identiques, (400 ou 800 kg C) qu'on fait aussi les chercheurs... Or, à la lecture du résumé, surtout dans sa version anglaise originale, il ressort que les deux apports sont faits de façon conjointe.
1. Il parait donc bien difficile d'affirmer que "la biomasse fongique augmente avec la concentration du sol en azote" puisqu'ils n'ont pas procédé à une concentration d'azote, les deux apports d'azote ayant été compensés par des apports de carbone proportionnels. Et même si on doute que les apports aient été à toujours conjoints, les deux chercheurs précisent que c'est quand l'augmentation des deux taux est conjointe que l'on a une augmentation de la masse fongique ("As C and N concentrations increased [...]concentration of C and N (together) in the soil correlated with both cellulose and lignin degradation "
2 . Dire que "les bactéries et les champignons n'ont pas été perturbés par l'ajout de BRF ou d'engrais azoté" est tout aussi hasardeux.
Les deux chercheurs disent seulement que la population bactérienne, et elle seule, "n'a pas été affectée".
3. Quant à l'idée que les bactéries "ont besoin" de nitrate d'ammonium "pour dégrader la matière organique", elle est justement réfutée par les deux chercheurs eux-même:
"La biomasse bactérienne active n'a pas été affectée par les additions de N ou C. " !!
Et c'est logique: les bactéries ne risquent pas de se nourrir de nitrates puisqu'elles les fabriquent, ces nitrates, à partir de l'azote organique! (il existe bien des bactéries qui réduisent les nitrates, mais elles ne se situent pas dans la chaine de décomposition de la matière organique puisqu'elles en font de l'azote gazeux)]
Les nitrates ça ne sert qu'à nourrir des plantes ou des champignons.
Et c'est d'ailleurs là que réside en fait l'objectif des deux chercheurs : montrer que la dégradation de la cellulose et de la lignine est une le fait de la biomasse fongique et non bactérienne.
C'est aussi ce que rapporte l'auteur de cet autre commentaire de l'article que je traduis ainsi:
Au cours d'expérimentations impliquant des apports de carbone (C) et d'azote (N) à des sols forestiers, ils se sont aperçu que lorsque la concentration de C et N augmentait, la dégradation de la cellulose et de la lignine ainsi que la biomasse fongique en faisaient autant. La biomasse fongique, ainsi liée à la dégradation de la cellulose autant que de la lignine, révèle l'importance de la population fongique dans le processus de décomposition.
On en conclu que le ratio cellulose/lignine/N était plus pertinent pour prédire le niveau de décomposition de la matière organique (et par conséquent, la qualité du substrat obtenu) que le ratio C/N commun.

Si on veut savoir ce qu'il se passe quand on touche vraiment à la concentration de l'azote, il faut donc se tourner vers un autre article.
J'ai fini par trouver le texte complet de l'article je parlais il y a peu et qui relatait des expérience en ce sens:
Influence of nitrogen on cellulose and lignin mineralization in blackwater and redwater forested wetland soils
Ici, l'auteur, qui n'est autre que l'un des auteurs de l'article précédent, n'a procédé qu'à des apports d'ammonitrate ( 200 et 400 kg), sur deux sols différents. Puis il a mesuré leur impacts dans le temps sur les population bactérienne et fongique, ainsi que les taux de dégradation de la lignine et de la cellulose.
Il conclu (traduction personnelle) :
Puis il discute ses conclusions en les comparant à d'autres travaux.Après 5 semaines d'incubation, l'apport de 200 ou 400 kg de nitrate d'ammonium à l'ha n'affecte pas la dégradation de la cellulose ou de la lignine. Après 10 et 15 jours, l'apport de 200 ou 400 kg de nitrate d'ammonium ralenti la dégradation de la cellulose comme de la lignine. L'apport de 400 kg ne ralenti pas plus la dégradation de la lignine et de la cellulose que celui de 200.
Morceaux choisis:
Les études in vitro ont montré que de hautes concentrations de N en milieu ligneux inhibent la dégradation de la lignine par la pourriture blanche.
Et pour expliquer ce phénomène, je rappelle les informations que donne Tisseaux dans sa compilation bibliographique:Fogg a relevé des preuves empiriques indiquant que lorsque N est ajouté à de la matière organique contenant un fort taux d'hemicellulose ou de cellulose, les niveaux de décomposition augmentent. Dans les situations ou N est ajouté à des matériaux organiques résistants, comme la lignine, les niveaux de décompositions baissent.
si les champignons profitent de l'amonium pour se développer, ils ne se mettent à dépolymériser la lignine que lorsque l'azote commence à se raréfier et que le C/N est autour de 100/170. (alors que dans un composteur, on est idéalement autour de 30)
Bref, fertiliser le BRF, pourquoi pas, mais attention aux doses car ici, le mieux est vite l'ennemi du bien.
La meilleure façon d'apporter de l'azote sans risquer la surdose, c'est peut-être d'utiliser des cultures de légumineuses puisque l'activité des bactéries fixatrices d'azote qu'elles renferment est elle même régulée par la concentration d'azote du sol et qu'à partir d'une certaine concentration, elles ne travaillent pas.