Bonjour
Le but est de construire le sol, cela prend plusieurs années, se méfier des méthodes qui promettent tout en un ou deux ans.
Il faut créer le complexe argilo-humique, plutôt que simplement "habiller" le sol. La base du travail du jardinier (et des vers de terre et bactéries du sol) est d'apporter et d'incorporer de la matière organique humifiée (transformée en humus) au sol argileux sur les premiers cm.
La couche arable s'éloignera peu à peu de l'argile de potier, avec des années de pratique.
Pour cela, il faut apporter chaque année une quantité raisonnable de matière organique en veillant à ce qu'elle soit carbonée (paille, etc.) mais aussi azotée. Le fumier est excellent pour cela, s'il contient de la paille. Les engrais verts aussi.
Contrainte : calculer ou estimer à la fois le rapport carbone/azote des apports, mais aussi leur quantité. Après quelques années, on arrive à voir si un fumier est trop ou pas assez pailleux, et on juge au poids de la brouette le nombre qu'il faut en apporter.
N'utiliser que de la paille va provoquer une faim d'azote : le sol va être privé de ses nitrates qui vont être mobilisés pour nourrir les micro organismes dégradant le carbone de la paille. Rien ne poussera durant de longs mois et on aura par contre de l'azote minéralisé après la fin des récoltes, donc inutilement apporté. Il faudra à la fois corriger en urgence au printemps avec de l'azote rapide (ammonitrate, purin, crottin, guano, compost riche, etc.) un peu au pif et accepter qu'en été les plantes reçoivent trop d'azote minéral, car il sera produit à contretemps. Du gaspillage de ressources.
Pas de paille du tout (fumier sans paille, crottin pur) va à l'inverse apporter une bonne dose d'azote mais cela ne construira pas le sol, il y aura deux couches, la zone organique en haut, l'argile en dessous. On n'aura pas ou peu créé une couche arable constituée du complexe argilo-humique suffisante pour éviter le lessivage des nitrates, le sol sera incapable de les stocker et les pluies les relargueront dans le milieu, d'où à la fois pollution et nécessité d'apporter régulièrement de l'azote rapide ou d'en apporter une fois une quantité énorme.
La méthode la plus respectueuse de l'environnement consiste donc à
- apporter en couche mince (2 ou 3 kg par m²maxi) du fumier pailleux ou du compost + engrais vert en fin d'été ou automne, directement sur le sol, se méfier des méthodes avec cartons ou autres séparations entre argile et matière organique ;
- laisser la matière organique azotée et carbonée se transformer en humus grâce aux organismes du sol, puis se mêler à l'argile grâce aux vers de terre, durant l'hiver ;
- laisser faire les bactéries du sol qui minéralisent lentement l'humus en ammoniac et nitrate qui se stockent dans le complexe argilo-humique créé, nitrates et ammoniac qui feront pousser les plantes au printemps dans la nature quand le printemps sera là ;
- retourner une à deux fois le sol sur une profondeur peu importante pour aider le travail des vers de terre et apporter plus d'air aux bactéries, accélérant ainsi les processus naturels (le travail du sol a permis l'agriculture et a fait passer l'homme du statut de chasseur cueilleur à celui d'agriculteur, c'est la révolution du néolithique) ;
- utiliser pour les cultures exigeantes un engrais azoté, mais après que le sol soit formé (au printemps en fait), car c'est le complexe argilo-humique qui fixe les nitrates et autres éléments et il ne sert à rien d'en apporter trop en automne ;
- faire cela chaque année car il faut des années pour construire le sol sans bouleverser sa structure.
Cela ressemble très étrangement à ce que recommandent depuis des décennies les agronomes. Bizarre.
Il faut éviter deux erreurs : ne pas apporter assez de matière organique, et en apporter trop.
Dans un cas le sol vivra sur ses réserves de matière organique et peu à peu l'argile sera de plus en plus en bloc, on détruira peu à peu le complexe argilo-humique.
Dans l'autre cas, comme on apporte plus de matière organique que ce que les organismes du sol sont capables de transformer en humus et d'intégrer au sol en un an ; on aura deux couches distinctes à la place d'une couche (la couche arable). Cela ne permet pas le stockage des nitrates, on a soit trop d'azote si on met trop de matière organique riche en azote (100% crottin, compost, fumier non pailleux), soit pas assez si on n'en met pas assez ou qu'on n'utilise que de la matière organique pauvre en azote (100% paille).
Une mauvaise solution est de ne pas se casser la tête pour créer le sol et de compenser le lessivage des nitrates par des doses d'azote impressionnantes, en apportant chaque année une nouvelle couche de plusieurs cm de crottin ou autre, ou bien en apportant régulièrement de l'ammonitrate ou du purin d'ortie. De nombreux débutants font cela ce n'est pas une critique. S'ils lisent mon long message jusque là, je les salue, on passe tous par diverses étapes quand on se met au jardinage. Ceux qui savent tout avant d'avoir eu l'humilité de se renseigner ont décroché depuis longtemps.